Article écrit par Boris Petroff le 16
octobre 2015

Boris Petroff nous a déjà habitué à
des reportages qui sentent le vécu
et la passion du ski de fond, et en
particulier récemment un article un
peu provoc
"je suis le meilleur" ou il nous
relate ses 28 Vasa.
Cette fois il nous narre : ses 17
Transju dont 3 ultra-trans... une
sacrée tranche de vie de fondeur, et
une personnalité aussi hors du
commun qu'attachante.
*****
Tout a commencé en … mars
1977. Je ne jurais que par le ski alpin,
et... ma compagne (de l’époque)
craignait la vitesse
Ben, on n’a qu’à essayer le ski de
fond : parait que c’est « pépère »
que je lui dis.
Et nous voilà inscrits à
l’OCCAJ d’Autrans, à un stage de
découverte du ski de fond.
Skis à farter (je m’en
souviens encore : des Fisher Europa
glass), technique, invités d’honneur… :
tout était impec dans ce stage de
découverte.
Le jeudi soir se pointe
un petit bonhomme costaud et passionné
avec sous le bras un film sur son
dernier enfant : « La traversée du
Vercors ». Dans ce film, un parisien
comme moi, explique qu’il prend le train
de nuit le vendredi pour Grenoble (eh
les jeunes, y avait pas de TGV à cette
époque) pour courir cette épreuve ! Et
rentrait sur Paris le dimanche soir.
Rien que ça.
Bien sur le petit
bonhomme, à qui je dois tant, j’appris
plus tard à mieux le connaitre…c’était
Claude Terraz, le Claude Terraz !
Moi qui approchais la
trentaine, habitais résolument la
capitale ; n’avais jamais songé que je
pouvais faire du sport, encore moins
(quelle horreur) porter un dossard, je
me suis dit..
-
Ptit loup, un jour c’est
toi qui feras ce truc !
Ni une ni deux : j’ai
arrêté de fumer, je me suis acheté des
Fisher Europa glass (avec des fixations
norme 45 qui vous faisaient de ces
ampoules sur le dessus du pied..) et
j’ai attendu l’hiver suivant !
Février 1978 : un stage à
la Mecque du Ski de Fond, l’accueil
montagnard de Chapelle des Bois. C’est
qu’on se renseigne vite, même à Paris !
Février 1979, nouveau
stage à Chapelle, mais l’objectif se
précise : « stage de préparation aux
courses populaires ». Géant. J’y ai même
déniché la femme qui depuis cette date
partage ma vie ! Et en final à ce stage…
une Envolée nordique avec mon copain Jef
connu à Autrans 2 ans plus tôt.
Et je ne m’étais pas
trompé en regardant ce court film à
Autrans : mon bonheur est bien dans ce
pré là ! Trop tard pour partir sur la
Traversée du Vercors et je me contente
du Massacre. Et puis le Jura c’est
vraiment le royaume du ski de fond.
Inopinément j’apprends
qu’une sorte de Traversée du Jura était
à l’étude, qu’elle aurait du avoir lieu
ce même hiver 79 mais que bon, cela ne
s’est pas fait.
-
Ca te dirait une
Traversée du Jura,
que je lui propose à mon
Jef ?
-
Of course !
-
On s’inscrit l’hiver
prochain ?
-
Chiche !
Et c’est ainsi que, forts
( ?) dans toute notre vie de sportif de
3 stages d’une semaine de ski nordique
et 4 courses (en début d’année 80 nous
avions fini les championnats d’Ile de
France, 15 km, et le Grand Paradis, 45
km), nous voici à 5h30 du matin, sur la
Combe du Lac à Lamoura…
Salut Pierrat, t’es pas
tout seul !
… Ah cette 1ère
Progressisme du Jura !
Je l’ai racontée par le
détail dans la revue de l’ANCEF, Ski de
Fond de France N° 15.
Extraits :
« Lamoura, 5h30 le 17
février 1980… Il pleut de la neige
fondue. Que farter ?!? (…) Finalement je
me décide pour une sous-couche de skare
spécial SWIX que je recouvre de
paraffine argent puis deux fines couches
de klister rouge Rode. Par précaution
j’emmènerai avec moi quelques farts de
correction : du klister jaune, du Silver
une raclette et une poussette de jaune
Ex Elite ».
Heureusement que
j’ignorais totalement à l’époque que
l’on pouvait paraffiner ses skis pour
gagner en glisse ! J’ai même failli
emporter une spatule de rechange. Et
faut voir les photos de ces années là :
knickers jusqu’aux genoux et chaussettes
hautes de belle laine…
« 8h00 : les 1800
concurrents piaffent et s’impatientent.
Bruits de skis entrechoqués. Que
j’aimerais être spectateur et voir cette
masse que nous formons s’élancer sitôt
le filet levé. (…) Et c’est parti ! La
recette pour les courses de grand fond
est simple
(osais-je écrire alors,
moi qui n’avais couru que 3 courses
populaires)
partir très vite, accélérer
progressivement et terminer au sprint.
C’est à peine une boutade en ski de fond
tant il importe de bien se placer dans
les premiers km. Je passerai peut-être 8
à 9 heures sur les skis : qu’importe, il
faut s’imposer un départ canon. Avec les
embouteillages rituels des 2ème
ou 3ème km je pourrai
récupérer mon souffle…(…)
Les Rousses. Il est de
bonne heure encore, 9h30, pourtant tout
le village est là et les vacanciers
forment sur plus d’un km une haie
d’honneur : quelle consécration pour le
modeste parisien que je suis…(…)
Bellefontaine … La neige
devient de plus en plus lourde. De la
soupe. L’accroche est bonne mais je n’ai
plus de glisse. Plus la force non plus
de pousser sur les bâtons. Tenir, tenir
jusqu’à Chapelle des Bois que je connais
si bien. Mais qu’est-ce que je fais là ?
Quelle idée absurde ! Popaul m’a
redoublé, sans même remarquer mon
calvaire. Je n’avance plus. Je profite
des plus petites pentes pour me laisser
glisser assis sur les talons. Mais que
c’est dur. Je me fais violence pour
continuer. On n’abandonne pas au 55ème
km. Je m’accroche à mon objectif des 6
heures pour tenir le rythme. Ma seule
préoccupation est d’éviter les fautes
dans le transfert de poids d’un ski sur
l’autre, dans l’impulsion, dans
l’accroche. Je ne cherche plus la
vitesse mais l’économie, l’efficacité.
Au comble de ma détresse, j’entends les
spectateurs commenter l’arrivée des
premiers ! (…)
La Combe des Cives : je
la connais comme ma poche. Une
succession de bosses dessinant un faux
plat montant. Mon accroche supérieure à
celle des autres que je vois reculer, ma
certitude maintenant de terminer me
donnent le tonus nécessaire pour
repartir à l’attaque. (…)
Plus que 15 km, 14,13,
12 : je skie mécaniquement, sans
recherche, pour en finir. J’en ai
franchement marre. Voilà 5 heures que
nous avons quitté Lamoura. Vivement que
ce soit fini. Le reste du parcours
descend légèrement. Je suis encore dans
mon timing. Et je m’y accroche pour
pousser sur les bâtons et grandir les
foulées.
Mouthe. Le dernier
kilomètre. Nous sommes follement
applaudis. Un sourire pour les
photographes. Depuis une demi-heure nous
skions dans un environnement … très
printanier : plus de neige alors que
sous nos skis. La pluie tombée la veille
a balayé les derniers centimètres. Quel
courage et quel enthousiasme a-t-il
fallu à ces bénévoles inconnus qui,
pelle à la main, ont charrié des
centaines de m3, des tonnes de neige,
pour que nous puissions glisser jusqu’à
Mouthe, terme de la merveilleuse
aventure, atteint après 5h56’. Moins de
6 heures : contrat rempli.. (…)
Auxonne. 21h00 : au
restau sur la route du retour sur Paris,
on reprend bien vite les kg perdus dans
la journée. Chacun raconte sa course.
Déçu ou heureux : dans 15 jours ou
l’année prochaine, on remettra ça.
L’ivresse du grand fond. »
Quand je relis cet
article 35 ans plus tard, je me dis que
rien n’a vraiment changé !
Si ce n’est que l’ami
Terraz a bien changé… ma vie puisque je
vis toujours cette ivresse du grand
fond.
Du reste nous avons couru
notre première Traversée du Vercors, mon
copain Jef et moi, cette même année :
le 16 mars 1980.

1981 : on parle déjà de
Transjurassienne !
Bien sur je suis revenu
l’année suivante. Toujours avec Jef.
Mais aussi avec mon épouse, rencontrée
deux ans plus tôt skis aux pieds. Nous
ne sommes pas encore mariés mais c’est
tour comme.
Je crois me souvenir
qu’il y fit bien froid au moment de
partir de Lamoura ! On gelait grave.
Certains évoquèrent jusqu’à moins
25¨°…Mais bien vite le soleil fut de la
partie. Et la neige aussi Jusqu’à deux
mètres de hauteur sur le massif. Pas de
soucis pour enneiger Mouthe jusque
devant la Mairie où était tendu le fil
de l’arrivée.
On faisait le détour par
le Brassus « bienvenue au pays du
fondant ! » mais on snobait Prémanon
city se contentant de saluer l’Ecole
nationale.
Bien sur il n’était pas
question de « style » : le patin n’avait
pas ôté ses roulettes et tout le monde
skiait en classique… sans le savoir.
Toujours la même tenue
(knickers, chaussettes hautes, pull)
mais des toutes nouvelles chaussures et
fixations Salomon qui ont bien vite fait
oublier les trop légères Adidas à tige
de l’an passé !
Je termine 802ème
en 5h51’ : 5 minutes de moins qu’en
1980. 6h30 pour Jef et 7h52 pour « mon »
Isabelle. Dans mes notes je signale que
Claude Terraz finit 31è en 4h03.
Le pli est pris : je
serai un fidèle de cette Progressisme du
Jura. Même si déjà ce nom (lié au
journal sponsor de l’épreuve) s’estompe
et qu’on évoque maintenant plus
facilement l’appellation de
Transjurassienne. On ne dit pas encore
Transju. Quoique…
Cette Transjurassienne
fut par ailleurs mon premier pas dans le
monde international de la Worldloppet.
Elle venait d’être admise dans ce cercle
restreint des 10 plus fameuses courses
de longue distance de ski de fond du
monde. Ce fut le premier tampon de mon
premier passeport. Il me fallut 9 ans, à
raison d’une course internationale par
an, pour le boucler. Je fus le 511ème
Master au monde.
Grâce à la Transju….
Je ne dirai rien de ma
3ème participation en 1983 :
je venais de changer de boulot, après
une année de quasi chômage. Une grosse
erreur de fartage au départ : les skis
qui bottent. La voiture parquée à
Lamoura (on dormait, tant bien que mal,
à Neige et Soleil ou un nom comme ça
dans un centre de vacances idéalement
situé à deux pas du départ). Bref j’ai
rangé mes lattes, récupéré l’auto et
suis bien vite reparti sur Paris, la
queue basse.
Je crois qu’en 37 saisons
et 318 courses de ski c’est la seule
fois que j’ai abandonné !
Cet abandon s’explique
aussi par le fait que, forfait en 1982
pour cause de Marcialonga je n’avais pas
pris … le train des sénateurs ! J’en
avais loupé une : c’était fini pour moi.
Cet abandon n’était pas conséquent. Et
le lundi matin à 8h00 je commençais un
tout nouveau métier comme Secrétaire
général adjoint d’une grosse ville de la
banlieue parisienne. Valait mieux pas
avoir les yeux au bas du menton. Depuis
ils s’y sont habitués…
Le passage au skate
Pour un parisien qui
bosse normalement (j’étais cadre et …
fonctionnaire et donc m’envoyais des
semaines de 45 heures !) marié avec 3
puis 4 enfants, il n’est pas simple
d’aligner les week-ends de ski, surtout
pour des épreuves finalement
éprouvantes. Engagé dans le circuit de
la Worldloppet (Gatineau en 84,
Finlandia et Birkebeiner en 85, Engadin
en 86, König en 87 et Dolomiten trois
semaines plus tôt), je n’ai retrouvé le
chemin de Lamoura à Mouthe qu’en 1988.
Je ne garde pas de
souvenirs marquants de cette Transju si
ce n’est que je sortais d’un colloque
très arrosé à Lyon, que c’était ma 1ère
Transju en skate (et encore l’une de mes
premières longue distance dans un style
appris tout seul et que j’étais très
loin de dominer).
Si, une anecdote :
j’avais réussi à m’inscrire sans licence
ni carte neige ni ticket course (cela
n’existait pas à l’époque)….
Bref, je mis 40 minutes
de plus que les premières années en
alternatif.
Et la parenthèse Transju
devait encore rester fermée plus de 10
ans.
Je ne saurais pas dire
pourquoi : j’ai toujours adoré le
parcours, jamais craint la montée des
Ministres ou la descente sur Chaux Neuve
ni ne fus rebuté par sa longueur. Tout
au contraire. Il est vrai que 1988 est
aussi l’année où je fis mes premiers pas
(Worldloppet oblige) sur la Vasaloppet
et qu’instantanément je décidai que
« celle-là je
la ferai tous les ans jusqu’à ce que
mort s’en suive ! »
Bref il fallut un
anniversaire, le 20ème, pour
que je retrouve le 21 février 1999 tous
les copains de la Transjurassienne.
La course des braves
C’est par ce titre que le
journal local rend compte de cette
édition. Quant à Stéphane Passeron il
dira à juste … titre que « cette
année là la Transjurassienne eut 2128
vainqueurs ». Les 2128 skieurs qui
n’abandonnèrent pas (sur plus de 3000
partants).
Une météo infernale, des
trombes d’eau au départ : le bus parti
de Chapelle nous avait lâchement plaqué
au dessus de la Combe du Lac dont nous
craignions tous qu’elle justifie
pleinement son appellation lacustre ! Je
nous revois, Hurbin, Godichon et tous
les autres potes, serrés les uns contre
les autres pour nous donner chaleur et
moral. Que l’attente du départ fut
longue.
Et une fois parti… ce fut
pire. Pour je ne sais quelle raison les
skis collaient littéralement à la neige.
Même dans la descente sur Bellefontaine
il me fallut pousser sur les cannes. Une
horreur permanente.
Cette année là je mis
plus de 7heures (7h03’ exactement) pour
relier Lamoura à Mouthe. Je n’en tire
aucun mérite si ce n’est de n’avoir pas
plié mes gaules à Chapelle où tant de
connaissances m’eurent volontiers
hébergé ou ailleurs.
La Transju ne fut pas,
cette année, la seule épreuve WL à
souffrir d’une météo impossible : 15
jours plus tard, à Mora en Suède, même
pluie, même neige lourde, impossible à
farter. Des traces inexistantes et 90 km
de calvaire. Sur 15 883 partants
seulement 10 893 classés à l’arrivée. Du
jamais vu à la Vasa…
Un parcours de replis
Deux ans plus tard, en
février 2001, j’eus beau m’inscrire, je
fus privé de Transju… comme tout le
monde, faute de neige.
En 2002 j’ai longtemps
craint que les mêmes causes produisent
les mêmes effets. Le mardi 12 février le
thermomètre annonçait + 8° à 1100 m. Le
mercredi 13 « un épisode de pluies
assez marquées suivi d’un
rafraichissement est attendu au cours de
la nuit de mercredi à jeudi. La neige se
limite aux sommets… » Que je
n’aurais pas aimé organiser la
Transjurassienne à la lecture d’un tel
bulletin météo.
Bon, la course eut lieu.
Et c’est l’essentiel. « Sur un
parcours totalement inédit entre Lamoura
et Prémanon » dixit l’organisateur.
Avec un passage à faire deux fois. Bref
un peu d’embrouille pour les meilleurs.
Pas pour moi.
Ouf : je me souviens des
propos de Jean Claude Dalloz quelques
semaines plus tôt :
« après l’annulation des
épreuves en 2001, il faudra que 2002
soit une grande réussite de manière à ne
pas plonger Trans’organisation dans un
cahot qui pourrait compromettre son
existence future. Mais la
Transjurassienne n’a-t-elle pas vécu des
étapes plus difficiles… ».
J’ai répondu présent. Sur
ce parcours de replis qui ne manquait
pas de panache. A défaut de neige il y
eut du soleil et de la bonne humeur,
malgré les quelques bousculades
inévitables sur certaines portions
ré-enneigées tant bien que mal. J’en
profitai pour prendre une bonne
trentaine de photos : finalement une
Trans réduite à 54 km, cela laisse du
temps libre !
Le beau retour du
classique !
Cela faisait des années
que je l’appelais de mes vœux et enfin
la Transju s’y mettait. Classique le
samedi et libre le dimanche.
Comme tant d’épreuves de
la Worldloppet.
La Trans’Marathon
classique est ainsi programmée le samedi
19 février 2005. Pourquoi « seulement »
42 km. Je n’en sais rien. Dommage :
cette distance ne permet pas d’obtenir
un tampon GOLD sur son passeport de la
Worldloppet. A l’inverse le départ de
Chapelle des Bois, le passage par le
Glacier (aux Marais), le final sur la
route de la vraie Trans me ravissent. Je
me sens chez moi.
Pour manifester mon
assentiment devant cette courageuse
décision j’envoie très tôt mon bulletin
d’inscription. Si tôt que William
Trachsel m’adresse un petit mot de
remerciement :
« vous êtes le 1er inscrit
sur la Transju 2005 et surtout
félicitations pour votre engagement sur
les deux disciplines : libre et
classique. Bravo de relever un tel défi
(…).
Car bizarrement, la
notion d’UtraTrans n’existe pas encore
en 2005. Il n’y aura pas de classement
officiel sur les deux styles. Peut être
que cela paraissait inconvenant pour les
organisateurs ? Pourtant mon ami Hannes
Larsson, 74 ans à l’époque, alignait
depuis des années déjà les deux courses
WL, classique ou skate le samedi et
réciproquement le dimanche partout où
c’était possible.
Sur le 42 km classique,
mon ami japonais, Minoru Matsuyama, est
de la partie. Mon Isabelle aussi. Autant
qu’il m’en souvienne il y eut belle
neige et belles traces pour célébrer le
retour du classique sur la Trans’. Je
finis dans les 100 premiers (99ème
pour être honnête) en 3h21.
Minoru (tout juste sorti
de l’avion le jeudi soir) et Isabelle,
main dans la main en 4h30.
Dimanche 20 février,
rebelote sur les 76 km de la vraie
Transju
Il y a toujours Minoru
mais aussi des amis australiens que je
cornaque sur cette WL française. Et mon
jeune neveu Romain dont c’est la 1ère
Transjurassienne. J’avais choisi un
hôtel à Morez pour ne pas trop galérer.
A 6h précise nous faisons
le poireau devant le supermarché de
Morez où la navette est prévue de
s’arrêter.
Une heure passe : rien.
Des bus mais aucun ne stoppe. On se les
caille…
Nous sommes une trentaine
à nous inquiéter de plus en plus !!
Que décider ? Petit à
petit tout le monde cherche une solution
de rechange. Pour ma part, à 7h15 je
retourne à l’hôtel, réveille Isabelle,
mets les chaines sur ma Zafira et nous
voici à sept personnes partis sur
Lamoura. Mais la route est complexe, il
nous faut faire bien des détours pour
atteindre enfin la Combe du Lac.
Il est 8h05 quand nous
arrivons. La première ligne est partie.
Heureusement nous n’en sommes pas …
Ce fut une année
enneigée : trop ! De fortes chutes de
neige durant la course rendent les 76 km
plus longs encore. 6h52’ pour moi, 6h55’
pour Minoru, 9h11 pour notre australien,
Alan Rae, qui fit toute la course en
alternatif et sans trace. Bravo à lui.
Pas de nouvelles de mon
neveu que j’espérais retrouver à Mouthe.
La nuit est tombée et il
nous faut rentrer sur Paris (Isabelle
nous attendait à Mouthe). Au moment de
quitter le village j’entends le speaker
annoncer l’arrivée du dernier. Quel
qu’il (ou elle) soit, il mérite notre
respect. Je gare la voiture et nous
filons tous sur la ligne d’arrivée
l’applaudir comme il se doit.
Et stupéfaction : voici
qu’est annoncé et arrive, fatigué mais
comblé, mon neveu ! Il aura mis
9h56’20’’ pour relier Lamoura à Mouthe.
« Dont 30 km avec le scooter des
neiges dans mon dos et les pisteurs
m’invitant à renoncer à chaque
ravito ! ». Sacré Romain, t’es bien
un Petroff !!!
Au fait, cette année là,
nous étions 9 à terminer ce qui
deviendra l’Ultratrans.
Trois semaines plus tard,
à Mora, pour ma 17ème Vasa…
je mettrai (en alternatif) 4 minutes de
moins pour 14 km de plus…
Une vraie UltraTrans
L’année suivante, 2006,
nous remettons le couvert.
Mais intelligemment, les
organisateurs de la Transju sont passés
à 50 km pour la course en style
classique avec un départ des Rousses.
Il fait très beau, sans
doute un peu froid, la neige est belle
et les traces magiques pour ce « nouveau
souffle du classique » comme le dit Ski
de Fond Mag. Les arbres sont givrés, la
traversée des Rousses grandiose.
Bref tout va très bien
Madame la Marquise… sauf que la bise
s’est levée et …souffle en rafale après
Bellefontaine. Juste pour justifier le
titre de Ski de Fond Mag !
A Mouthe, après en
réalité 53 km, je passe la ligne (en
4h43’) sous les applaudissements appuyés
du speaker… qui félicite la petite jeune
fille qui termine sur mes talons : Fanny
Girod, que nous avons connue toute bébé
à nos débuts en ski de fond ! C’est son
père, Jean-Luc Girod, qui organisait
avec Roland Tuetey ce fameux stage de
préparation aux courses populaires en
1979, vingt six ans plus tôt !
Le lendemain, retour sur
la grande.
Moins 21 ° au
thermomètre. La course est décalée d’une
demi-heure. Heureusement le vent de la
veille s’est calmé.
Cette année c’est mon
plus jeune fils, Alexis, qui
m’accompagne sur la Trans’. Il est …
transi de froid, gelé, bien incapable
d’aligner les km. Mais il est là ! Nous
dormons dans un gite en contrebas de la
Combe du Lac que nous rejoignons skis
aux pieds. C’est cool mais fait très
froid et ça monte raide !
Je ne suis pas bien remis
des efforts de la veille et la nuit fut
tourmentée, toute agitée par les
« alpins » qui avaient prix possession
du gite.
6H56’ : décidément la
Transju n’est pas une course qui me
réussit. Alexis abandonne au 38ème
km, à Bois d’Amont retour :
« trop froid pour
continuer ! »
Bon, j’aurai toujours
rempli mon contrat des 130 km en deux
jours, mini exploit que je reproduirai
le week end suivant au Canada pour les
Gatineau courues par une température
encore plus rigoureuse : moins 18 °
seulement … mais avec un terrible vent
incessant le samedi !
Replis sur le Massacre
2008 : à nouveau l’UtraTrans,
à nouveau une multitude d’amis venus du
monde entier : le classique attire
indéniablement tous ces admirables
vieillards (… de mon âge) qui restent
fidèles à leur style de début.
Dont notre excellent
Doug, Douglas Jackson, australien de
Sydney, Nouvelle Galle du Sud.
Doug et son épouse Tim
ont passé la semaine en Engadin. Il est
prévu qu’ils nous récupèrent le vendredi
vers 18h00 à la gare de Genève. Pour
notre part, Isabelle et moi, sautons
dans un TGV vendredi après midi,
directement du boulot.
18h00 : pas de Doug à la
gare de Genève ! Ni dedans, ni dehors,
ni à côté, ni un peu loin…
Cela ne lui ressemble
pas.
18h15 : on fini par se
joindre par téléphone….. Il est à plus
de trois heures de Genève ! Il s’est
fié (en bon australien qu’il est) au GPS
de sa BMW de loc. qui l’a fort
aimablement guidé … sur une route fermée
l’hiver ! Le temps d’arriver au pied du
col fermé, de comprendre son erreur, de
faire demi-tour et choisir un itinéraire
plus adapté à la saison, il n’est pas
annoncé à la gare de Genève avant 21h00.
C’est catastrophique
parce que nous avons rdv à Prémanon chez
une personne que je ne connais pas
avant-20-heures-au-plus-tard pour
récupérer les clefs de la maison qu’une
copine nous prête sur Prémanon le temps
du week end.
Je me renseigne sur les
bus pour Prémanon. Que dalle bien sur !
Louer une voiture et la laisser dimanche
quelque part dans le Jura ? Difficile
(et surement très couteux). Trouver un
taxi ?
Bref, on est dans la
merde.
Je téléphone à mon
aimable correspondant à Prémanon
(heureusement que j’avais son N°) pour
négocier quelques heures de retard où
une autre façon de récupérer les clefs.
Et là, magie du ski de
fond : notre « portier » n’est autre que
le responsable des navettes à la Transju !
C’est le plus grand des hasards car
c’est en tant que voisin de sa résidence
secondaire de Prémanon que ma copine
parisienne le connait. Elle-même n’est
pas skieuse.
« Si vous pouvez être
dans une demi-heure sur le parking de
l’aéroport de Genève, je fais patienter
un chauffeur de navette qui devait
prendre des concurrents… qui ont loupé
leur avion et n’arriveront que demain.
Il connait mon adresse : il vous
déposera devant chez moi… »
Tout devient simple.
En1/4 d’heure de train nous sommes à
l’aéroport, 5 mn plus tard dans minibus
Peugeot et une heure plus tard à
Prémanon où cet excellent ami (dont le
nom m’échappe) nous reçoit avec toute la
gentillesse jurassienne.
Et nous ouvre les clefs
de notre paradis de Prémanon (dont il a
ouvert le chauffage quelques heures plus
tôt : un régal).
Et il ne nous reste plus
qu’à attendre, au restaurant, nos
australiens qui finissent bien par
arriver, confus mais heureux de ce beau
dénouement.
… Et à nouveau un
parcours de replis.
Départ Combe du Lac et
arrivée … à Prémanon.
Le départ est fixé à
10h00, à ¼ d’heure de notre hébergement.
C’est bon les grasse- matinées un jour
de course. Si le parcours est
« animé » : 50 km sans franchement de
moments calmes ou plats, la neige est
sublime, le ciel d’un bleu sans faille
et le soleil généreux. 3h47 pour moi,
3h51 pour Minoru revenu cette année,
4h13 pour l’inusable Hannes Larsson et
4h18 pour Doug.
Le lendemain je remets le
couvert en skate mais accompagné de mon
Isabelle avec qui j’ai promis de faire
cette Transju.
Même décor que la veille
sauf que… la neige tendre des pistes en
classique est devenue (dans les
descentes) méchante glace vive !
Eprouvantes à monter et crispantes à
descendre, les bosses deviennent vite
pour isabelle un cauchemar. Au ravito du
25ème je la sens hésitante.
Heureusement Roland Tuetey est là qui
joue (aussi) les bons samaritains pour
je ne sais quel copain. Dans la dernière
vraie côte, après le 34ème
km, elle s’arrête purement et
simplement. Elle ne déchausse pas mais
se refuse à repartir. Comme je l’incite
(un peu vivement) à ne pas s’endormir si
près du but… elle me plante franchement
son bâton dans le mollet.
Je comprends la leçon et
c’est tranquillement, main dans la main,
en amoureux, que nous finissons cette
Transju : la 3ème pour
Isabelle et ma 11ème si je
compte bien.
Mon neveu, mieux préparé
que l’an passé, termine en 3h15…

Le « bi-Style » reconnu
officiellement
J’ai repris gout à « ma »
course Worldloppet, je veux dire à celle
courue dans « mon » pays.
Et c’est tout
naturellement que je redouble les
Transju en 2009 après les essais bien
transformés de 2005, 2006 et 2008.

En 2007 j’étais au Japon
à Sapporo, le jour de la Transju dont je
ne suis pas sur qu’elle ne fut pas
annulée faute de neige.
2009 : je dors au collège
des Rousses le vendredi soir. C’est
top : sur la ligne de départ du 50
classique. Au mur dans ma
chambre des posters de fillette de 14/15
ans visiblement amoureuse de quelque
chanteur de moi inconnu. Un beau lieu,
attachant, confortable pour une paire de
nuits…
Romain m’y retrouve le
samedi matin pour que nous fassions de
concert ce parcours classique. Temps
couvert, neige bizarre, que nous fartons
sans grande précision.
A la sortie des Rousses,
son téléphone sonne : sa fille restée à
Lyon avec sa maman, a eu un malaise et
il a fallu la transporter à l’hôpital !
Inquiet il attend (et moi avec lui bien
sur) des nouvelles plus fraiches. Le
temps passe. Les skieurs plus lents
aussi !!
Finalement après une
vingtaine de minutes tout le monde est
rassuré et nous reprenons la route. Le
fart est de plus en plus incertain. A
Bois d’Amont avant d’escalader les
Ministres nous choisissons de nous faire
refarter sur le stand Toko.
Catastrophe : nous
bottons grave ! Je ne sais quelle
mixture (franchement inadaptée) nous
avons récoltée sur nos skis mais Romain
autant que moi restons collés au sol.
Nous n’avons ni raclette ni rien d’assez
aiguisé pour enlever cette couche de
glue. Mais si : mon appareil photo… il
est métallique et plutôt tranchant. Et
il nous sauvera la mise. Finalement
après 4h28 de péripéties diverses nous
passons la ligne d’arrivée à Mouthe,
bien contents de cette sortie commune.
Il ne me restera plus qu’à défarter mon
appareil photo !
Un
bus nous ramène presque directement sur
le collège des Rousses où je retrouve
mes posters et quelques amis.
Dimanche, navette réglo
pour Lamoura et nous voici repartis pour
un tour. Un peu plus long.
Toujours de la neige
épaisse et qui brasse un max, toujours
un temps couvert, toujours l’impression
que la TRANSJU ce n’est pas ma course !

Peut-être que j’ai tort
d’enchainer classique et skating.
Peut-être que je suis trop gourmand.
Mais encore une fois je
mets près de 7 heures pour cette Trans’.
Je suis certes classé au challenge
bi-style mais à la 26ème
place sur 29. Pas terrible le Popoff…

Le
traditionnel bouchon de Bois d'Amont
En 2010 pourtant, je
remets ça
Toujours un hébergement
au collège des Rousses mais nous y
serons 4 : Régis Peschot, Xavier Hurbin,
Romain et moi. Romain que j’ai retrouvé
à Lyon Part Dieu et qui nous emmène aux
Rousses
Toujours un doublé
classique et libre.
Samedi, 50 km classique :
une fois encore la neige est belle et le
temps clair. Ce qui nous laisse
apprécier ce parcours dont je n’ai
encore rien dit mais qui est un régal
pour les yeux. Après une petite boucle
rapide autour des Rousses nous
rejoignons sur la route de Bois d’Amont
le parcours habituel de la Trans. La
montée sur les Ministres avec son petit
raidillon de départ, ses plats montants
successifs et l’ultime coup de rein
avant de passer le ravito des Ministres
et peu après entamer la longue descente
sur Bellefontaine.
Le petit pont sur les
Lacs, la lente remontée sur Chapelle, le
passage sous le portique chapeland juste
derrière l’église, la Combe des Cives,
la courte mais sévère côte pour le pré
Poncet, la dégringolade sur Chaux Neuve
et ses tremplins (Salut Jason : on pense
bien à toi), le détour derrière Chaux
Neuve et la traversée de Petite Chaux.
Encore quelques petites bosses quand on
n’en veut plus. Le passage, assez
nouveau et fort sympathique, en forêt
avant d’entrer à Mouthe par le poste
frontière.
Et Mouthe transformé de
fond en comble pour accueillir de bien
belle manière les concurrents. Seul
regret : pas de café ouvert pour se
taper une bonne pression !
Oui c’est une belle
course la Trans et je crois qu’elle n’a
rien à envier aux plus grandes
Worldloppet.
Cette Trans classique, je
la boucle au 292ème rang en
3h46’. Régis me prend 5 minutes et je
bats Xavier de 17 minutes, Romain de
1h05. Mais il est vrai qu’il est né du
temps du skating et n’est pas encore
bien à l’aise en classique.
Au fait je ne parle
jamais des premiers, parce qu’ils ont la
grande presse pour ce faire. Mais c’est
un vétéran, Rézac, qui gagne en 2h24’.

Dimanche retour à la
Combe du Lac pour une vraie Transju de
76 kilomètres. Guère de souvenirs si ce
n’est d’une neige froide et donc peu
glissante. Ce qui n’est pas de nature à
me réconforter après mes efforts de la
veille. Au passage devant le fort des
Rousses, je passe à la Sylvie (Comby) à
qui j’avais donné précisément
rendez-vous là, son passeport et celui
de Jean-Yves : je me suis occupé de leur
visa pour la Russie où nous allons de
concert le mois prochain… C’est plus sur
que la poste…
J’en finis en 6h43 loin
derrière Régis (5h32) et battu par
Xavier (de 30 minutes). Et je ne parle
même pas du chrono de Christophe
Perillat : 3h23. Presque deux fois plus
rapide que moi…Décidément il faut que
j’arrête le doublé Classique/skating.
Retour cool sur Paris en
TGV de Frasne, grâce à la navette
Mouthe-Frasne : belle idée.

Le Jura se prend des airs
de Sibérie !
En 2011 je retourne à
Sapporo.
2012: dans l’espoir
d’améliorer mon chrono je fais l’impasse
sur le 50 km classique et ne m’inscris
qu’au 76 skate.
Comme l’écrit Gilles
Perrin sur le site des Masters, « ce
fut une édition glaciale et hyper
venteuse. -17° au départ et -23°
ressenti, avec un vent violent,
incessant et soufflant parfois en
rafales ». Suffit de voir comment on
était habillé avec des bouts de scotch
sur tout ce qui pouvait dépasser (nez,
joues...).
Isabelle qui devait
prendre le départ du 54 km aux Rousses…
reste prudemment au chaud dans la
voiture et aura la bonne idée de nous
attendre à l’arrivée. Nous ? C’est que
le Romain est encore de la partie.
Après Les Rousses, cela
devient véritablement insupportable avec
cette bise glaciale qui vous cingle le
visage de face. On n’ose pas doubler,
restant prudemment aussi protégé que
possible derrière celui de devant,
quelle que soit sa vitesse !

Le bruit se propage dans
le peloton : « parait qu’on ne va pas
au Brassus… Parait qu’on monte
directement sur le Risoux à Bois
d’Amont. Parait… ». Comment cette
info est-elle arrivée dans le peloton ?
Mystère. C’est trop beau pour être vrai.
Chacun y croit sans trop y croire
cependant. Quelle déception si c’était
une (mauvaise) plaisanterie !
Et puis il s’est avéré
que c’était exact. Tant pis pour les
Suisses. Moins que les 6 km sauvés,
c’est les ¾ d’heure de souffrance en
moins qui nous réjouit tous. Dans le
Risoux on sera à l’abri et sur Chapelle
il fera peut-être meilleur et on aura
moins de vent. Oui, c’est sûr…
En effet la montée du
Risoux, surtout avant la première
épingle, avec le vent arrière, fut un
régal. Après Bellefontaine la bise
s’était calmée. Chacun reprenait espoir,
certains sortaient même des traces pour
risquer un dépassement…
Mais après Chapelle,
catastrophe : la bise redoubla
d’efforts. Comme pour nous garder plus
longtemps avec elle ou nous ramener à
Lamoura ?
On finit bien par finir :
6h17’ pour moi (pour seulement 70 km) et
7h35 pour Romain, trop frêle pour bien
supporter de tels froids.

Le temps des gelures
2013 : on prend les mêmes
et on recommence !
Une nouvelle fois je
décide de faire l’impasse sur le
classique du samedi.
Et c’est en famille que
j’attaque cette nouvelle
Transjurassienne : ma 17ème
participation.
Romain et Alexis courent
les 76 comme moi, Isabelle, Nicolas (mon
autre fils) et Hervé (mon gendre) se
contentant des 54 km.
Comme toujours je pars un
peu juste de mon hébergement (le fameux
chalet de Prémanon dont j’ai pris cette
fois ci les clefs à Paris…) et arrive à
5 mn du départ sur la Combe du Lac. La
météo est annoncée plutôt cordiale :
moins 5 ou moins 8 au départ et se
réchauffant progressivement dans la
journée avec le soleil.
J’ai amené mon (gros)
appareil photos pour immortaliser tous
ces Petroff en Transjurassienne.
Et donc des gants assez
fins : pour être à l’aise pour les
différents réglages.
Il ne reste plus que deux
minutes pour rejoindre ma ligne de
départ (la seconde parce que je suis
Ambassadeur) et je n’arrive pas à faire
le nœud de mon sac vestiaire. Je
m’énerve, ce qui n’arrange rien.
« Départ de la seconde
ligne dans une minute … »
Excédé, j’enlève mon gant
et finis par boucler ce sac. Je me
regante à tout de vitesse et file jeter
mon sac dans le camion ad hoc : j’arrive
juste à temps dans l’enclos quand se
lève le filet.
Je trouve que l’air est
bien frais pour -8°.
J’ai rendez-vous avec
Isabelle quelques km après les Rousses.
Vu qu’elle part une heure trente après
moi, je devrais rapidement la rattraper.
Les premiers km de la
Transjurassienne sont rudes. Ca monte
dès qu’on quitte la Combe du Lac. Cela
monte encore pour le fort des Rousses.
Et curieusement je n’arrive pas à me
réchauffer ; la neige crisse étrangement
pour la température annoncée Mais je ne
pense guère à cela, préoccupé à ne pas
arriver sur les concurrents du 54 km
avant Isabelle (… je ne pourrai pas en
ce cas la rattraper !) ni trop après.
Pas de nouvelles de
Romain ni d’Alexis : normal ils sont
partis en 4ème ligne et n’ont
pas encore refait leur handicap.
« Coucou ma chérie ! Me
voilà »

Comme prévu entre les
Rousses et Bois d’Amont, mais assez près
des Rousses je retrouve ma belle
Isabelle. Elle tire fort la langue.
Visiblement c’est un jour sans.
« Tu sais combien il
fait ? »
« Non, assez froid j’ai
l’impression »
« Pour sûr : moins 15° !
Parait que vous avez eu jusqu’à -18 ° ce
matin sur la Combe du Lac… ».
Demie surprise pour moi.
Je trouvais aussi la météo bien
optimiste. Mais je n’avais pas
franchement eu le temps de m’attarder
Combe du Lac.
Je lui demande des
nouvelles des gamins ?
« Nicolas est parti comme
une fusée, entrainant dans son sillage
Hervé. Dès le premier km je les ai
perdus de vue… ».
Sacrés gamins.
Les kilomètres passent…
au rythme d’Isabelle qui n’est pas le
mien. J’ai beau sprinter puis m’arrêter
le temps de quelques photos je ne me
réchauffe pas. J’ai froid nulle part
mais je sens comme un engourdissement.
Bois d’Amont retour.
Comme souvent par neige froide, la
glisse est médiocre et Isabelle ne prend
aucun plaisir à cette Transju.
Finalement elle décide d’arrêter là son
clavaire.
Et me libère. Je monte
assez bien les Ministres, enchaine à
fond sur Bellefontaine et Chapelle,
rejoins mon gendre dans la Combe des
Cives. Quelques photos et je repars.
Dans la descente sur
Chaux Neuve je manque de peu m’écraser
sur un pauvre gars qui semble s’être
pris les pieds dans les spatules.
Pas de trace de Nicolas.
A 100 m de l’arrivée,
Isabelle est là qui m’applaudit.
Passée la ligne, je
reviens sur mes pas et questionne
Isabelle :
« T‘as vu Nico ? Je ne
l’ai pas doublé »
« Non : je crois qu’il
n’est pas arrivé mais il ne doit pas
être loin : vous êtes passés à quelques
minutes l’un de l’autre à Chaux Neuve »
Je l’ai sans doute loupé
à un ravitaillement.
Je me place à un endroit
stratégique, ressors l’appareil photo et
attends.
Peu de temps après, en
effet, le voici qui arrive. Usé mais
ravi.
Et il m’engueule
« Ca t’a pas gêné de me
passer dessus dans la descente sur Chaux
Neuve ! C’est tout juste si j’ai eu le
temps de me recroqueviller pour te
laisser passer ! »
Le tas en vrac dans le
canion, c’était mon Nicolas !!!
Quelques minutes plus
tard c’est Hervé qui déboule.
Isabelle m’apprend que
Romain et Alexis ont abandonné l’un à
Bois d’Amont retour, le second à
Chapelle : tous deux pressés de
retrouver leurs chéries et peu emballés
par le manque de glisse.
Je remballe mon appareil
photo, rechausse mes skis et me décide à
récupérer mon sac vestiaire, me doucher,
manger.
Surprise sous la douche :
ma main droite (celle dont j’ai ôté le
gant au départ pour ficeler mon sac) est
toute blanche. Les doigts réagissent
mal, ils sont gonflés. Aucune douleur
mais peu de réaction dans cette main
droite. Isabelle consultée me convainc
bien vite d’aller à l’infirmerie.
« Engelures manifestes »
diagnostique le médecin
qui me plonge la main dans une bassine
d’eau tiède.
« Aie ! »
La douleur m’arrache un
cri.
« Bonne nouvelle, ce
n’est pas complètement gelé »
me dit alors le toubib portant occupé
ailleurs.
Quand l’eau commence à
fraichir, il m’enduit la main d’une
potion grasse et me renvoie dans mes
foyers en me conseillant vivement
d’éviter le froid pendant un ou deux
mois.
Au fait j’ai fini cette
Transju en 7h02 (dont une demie heure
environ perdue –fort agréablement- aux
côtés d’Isabelle entre Les Rousses et
Bois d’Amont retour).
Il ne me reste plus qu’à
rentrer en auto sur Paris.
Ma main, enfin dégelée,
ne me fait absolument pas souffrir. Pas
plus de douleur en dégelant qu’en gelant
le matin à 8 h00 Combe du Lac.
Ne pas exposer ma main
au froid ! Il en a de bonnes le
médecin : samedi prochain je suis au
Canada pour la Gatineau (55 classique et
55 skate) puis en Suède pour la Vasa (30
et 90 km classique) puis en Pologne pour
la Bieg (10 km, puis 50 classique et 30
skate), en Suisse pour l’Engadin (42 km
skate) et enfin en Norvège pour les
Birkebeiner (54 km classique le vendredi
et kif kif le samedi)….
A Paris je prends
d’urgence rdv chez mon médecin.
Peu habitué aux gelures
il consulte internet.
« C’est comme un œdème »
Il me fait une ordonnance
pour des piqures (pour supporter l’avion
et les changements de pression), une
crème grasse et m’invite fortement …
« à faire
gaffe ! Vaut mieux perdre une course que
ses doigts).
Epilogue : quatre doigts
(tous sauf un bout du majeur) sont
devenus noirs. Insensibles. Par respect
pour mon environnement j’ai gardé
continuellement un gant fin noir sur la
main droite pour masquer le désastre.
J’ai couru toute mes
courses avec des chaufferettes et une
moufle à la main droite (sauf la
Gatineau skate : il faisait -20° et un
peu de vent. J’ai préféré m’abstenir et
me contenter du 55 km classique de la
veille).
Au bout de 4 semaines la
pourriture noire est tombée et une belle
peau rose l’a remplacée.
Depuis je fais simplement
attention quand il fait un peu froid ;
Mais j’en veux tout de même un peu aux
organisateurs de la Trans qui ont
annoncé une température clémente quand
celle réelle au départ de la course
frisait si ce n’est dépassait la limite
autorisée.
Bon c’est oublié et je
suis pressé d’enfin battre mon record
sur la Trans… maintenant qu’elle est
raccourcie à 68 km. Ou sans doute 69,
même si accoler ce nombre à L’amour à
Mouthe peut en effet prêter à sourire….
Boris Petroff
Récapitulatif
Année |
Style |
Distance |
Temps |
1980 |
Classique |
76 |
5h56 |
1981 |
Classique |
76 |
5h51 |
1983 |
Classique |
/ |
Abandon |
1988 |
Skating |
76 |
6h34 |
1999 |
Skating |
76 |
7h03 |
2002 |
Skating |
54 |
4h21 |
2005 |
Classique |
42 |
3h21 |
2005 |
Skating |
76 |
6h52 |
2006 |
Classique |
53 |
4h43 |
2006 |
Skating |
76 |
6h56 |
2008 |
Classique |
50 |
3h47 |
2008 |
Skating |
50 |
5h20 |
2009 |
Classique |
50 |
4h28 |
2009 |
Skating |
76 |
6h57 |
2012 |
Skating |
70 |
6h17 |
2013 |
Skating |
76 |
7h02 |
Total |
6 cl et 9 sk |
977 km |
Dans les 85 h |
|